Test Gran Turismo 7 : un quart de siècle pour une éternité (et votre CB)Environ 12 minutes de lecture

by Le Stagiaire31 mars 2022

Une fois n’est pas coutume, la sortie de Gran Turismo 7 n’a pas été retardée et colle avec les 25 ans de la licence. Chez Hoonited, nous nous sommes procurés la galette contre 99 €, avons chopé un paquet de madeleines de Proust, nos gants de pilotes, notre CB et avons pondu ce test plus orienté boomer nostalgique que hardcore gamer geek. Un test effectué via la manette PS5 Dualsense et le kit volant Thrustmaster T300RS et une flopée de personnes venues s’essayer au jeu (le pied de jouer IRL).

Voici notre test de Gran Turismo 7

On a pris des claques et pour certaines, on s’en serait bien passé.

Gran Turismo Anthologie : c’est dans les vieux pots qu’on fait les mêmes soupes

Vous faisiez quoi il y a 25 ans ? J’envisageais les 2 DLC de la vie qu’étaient le permis et le sexe (le premier permettant parfois d’éviter de payer pour le second).

C’était en 1997 et Micromania diffusait des replays de Gran Turismo. C’était fou ! Pour la première fois, ce n’était pas une Ferrari mal dessinée, une F1 ou une caisse de rallye dans un décor en 3D isométrique qui symbolisait le jeu de course sur console. Pour une fois, la caisse de monsieur tout le monde pouvait se prendre pour le bœuf et jouer des pare-chocs avec les taureaux et autres chevaux sur la piste.

Un fantasme qui m’a permis de toucher au pilotage en attendant d’avoir le permis justement, et fait croire qu’on pouvait tourner sur circuit avec une Nissan Primera. Puis le 2, le 3, le 4 et son intro avec la GT40 qui filait des frissons. Gran Turismo a passé les époques et les joueurs de la première heure ont aussi mal vieilli que les graphismes.

Cela faisait deux opus qu’une édition signature accompagnait la sortie d’un Gran Turismo. J’avais eu celle du 5, une belle boite peinte de la peinture noire d’une SLS AMG avec une miniature, des goodies et surtout, un livre : l’APEX.

Un guide sur les stratégies de pilotage. Une bible pour tout pilote en devenir. Ce bouquin , c’est le Real Driving Professor.

Pour le 6, Polyphony Digital a remis ça et c’est mon frère qui se l’est procuré (j’avais pas de Playstation à ce moment là mais on s’en fout). Il m’a filé le bouquin en ajoutant « même avec ça, t’arriveras pas à mettre le capot devant ». C’est vrai qu’il est toujours devant, je n’ose jamais lui prendre un tour, le respect, toussa.

Virtual Insanity

Pour Gran Turismo 7, nada. On a une version ultime qui nous file 5 voitures virtuelles et des crédits. Soit, je prends, mais j’aime les objets collector. J’en ai vite fait le deuil. La galette dans la PS5 (et ouais ma gueule) j’attends l’installation des 113 Go de données. Bienvenue dans le TURFU du jeu vide Hé Ho !

En 10 ans, Gran Turismo a laissé l’aspect campagne pour devenir un simulateur avec la GT Academy en 2008. Simulateur qui a propulsé sur le devant des circuits des pilotes biberonnés aux pixels plutôt qu’au Super.

Le tuning s’était fait la malle arrière. Il n’y avait pas de challenge en solo. On prenait une caisse et on roulait sans intérêt aucun. En ligne, on se faisait défoncer par des hardcore gamers et des e-driver pro équipés full Fanatec (volant, pédalier, baquet et même une équipe avec un parasol assurant le changement pompes quand toi tu joues en chaussettes). Le délire n’était plus là, clairement. En parallèle, Forza Horizon qui permettait de rêver à rouler n’importe où sur une bande son de folie répondait à un Forza Motorsport de plus en plus pointu et riche. La concurrence était là.

Mais Gran Tursimo n’est pas qu’un jeu. C’est une encyclopédie de la tire, une ode à la bagnole, une déclaration d’amour à la passion automobile. Tandis que Jeremy Clarkson faisait l’apologie de la vitesse en intro de Forza, Gran Turismo montrait la création d’une caisse depuis la fonte du métal servant à la carrosserie jusqu’à ses premiers tours de roues sur la piste. Deux salles, deux ambiances.

Gran Turismo botoxé

Nostalgeekerie

Gran Turismo 7 est un remake moderne du premier opus. Tout a été amélioré, et amplifié. Les défauts sont toujours là : prendre un mur n’a pas d’effet réel, les contacts ont adopté les gestes barrières à défaut de les défoncer, les crissements de pneus rappellent bien tristement le premier opus, mais…

Mais tout est tellement bon, sexy et bien foutu, que comme le dirait ce philosophe de mon quartier : « balék frère ».

Les permis ont été revu à la hausse par rapport à GT Sport : chercher l’or est assez facile en B et A. En international on y laisse des larmes de SP98. C’est une porte d’entrée. Car GT7 ne vous donne pas tout, tout de suite. Vous débloquez des challenges, voitures, fonctions et circuits au fil des courses et épreuves. Le café est un espace rigolo avec ce gars qui parle de propulsion arrière, de traction avant (le con). Des petites erreurs encore une fois qui font place à un gros kiffe plein d’amour.

Les épreuves, missions café, missions tout court et championnats s’enchainent avec une fluidité que seule l’envie de prendre des photos, d’admirer les voitures et tuner une Prius entrecoupera. C’est directif mais ça permet de faire le tour du contenu et d’apprécier.

Pour la première fois, le jeu intègre un cycle météo dynamique et la pluie. Oui, la pluie, avec des averses et des variations qui influent sur la conduite et l’adhérence. Franchement ça le fait, bien qu’on ait découvert ce principe sur d’autres licences il y a une décennie. La légende raconte que la météo se calque sur la réalité, afin d’avoir un cycle dynamique en temps réel, je n’ai jamais pu le confirmer mais OSEF.

Le son aussi est enfin correct. Les mélodies des moteurs changent selon les modifications apportées. On reconnaît un V8 d’un 4 cylindres et la CVT de la Prius gueule autant qu’en vrai, avec cet effet ON/OFF quand on appuie ou relâche la pédale et même les animations du tableau de bord avec charge/décharge de la batterie (c’est trop Kawaï je kiiiife).

Tuned me on, Tuned me oooooooon !

Après trois bonnes heures de jeu, toutes les zones sont accessibles. Du tuning jantologique à la modification mécanique, tout est possible dans GT7, à condition d’avoir du fric. Notez qu’il est désormais possible d’acheter les peintures des constructeurs (peintures réelles) et donc de mettre un beau rouge Ferrari sur une Porsche si c’est la vie que vous avez choisie.

Evidemment, les livrées sont de la partie. On peut les enregistrer et les partager. Certains utilisateurs sont d’ailleurs de vrais artistes (et de gros malades).

Je me retrouve à passer 5 heures à prendre des photos sur des courses de 5 minutes et contrairement aux autres, je trouve les effets de lumières très réussis principalement avec le Ray Tracing activé même si je n’ai jamais bien compris le concept de cette option.

Cet aspect, zen, lent, qui permet de savourer le jeu sur de longs mois est bien là. Même un peu trop d’ailleurs. Les informations sur les modèles sont riches et intéressantes, bien que mal mises en forme avec une maquette de présentation pas hyper adaptée aux petits écrans.

Des informations qui font éco à celles données par Luca, le gars chelou des missions café, qu’on appellera le « missionnaire » et qui se contente de balancer l’équivalent des premières lignes des pages Wikipédia. Mais j’aime bien ça, car je ne lis pas toutes les pages Wikipédia.

Real Driving Simulator

Des sensations aussi pures que des produits laitiers

On pourrait blablater des heures sur le niveau de réalisme d’un jeu de bagnoles. Néanmoins, Gran Turismo est le meilleur sur ce point sur console. On gèrent les transferts de masse comme jaja. Conduire une propulsion à moteur central arrière est différent d’une 4RM à moteur avant. Même les Porsche sont différentes entre elles, sur le plan de la conduite je veux dire.

Enchainer les tours sur GT7 te permet de faire quelque chose sur circuit dans la vraie vie et pas simplement te manger les barrières. On sent le poids des caisses à la différence d’un Grid ou même d’un Forza Motorsport plus permissif à ce niveau (je trouve, pas taper).

Monter sur les freins, placer l’avant, titiller le chrono, mémoriser les virages, tout ça prend une autre dimension quand on doit gérer le carburant, l’usure des pneus, le petit qui tire sur ton bras avant une courbe et les dommages mécaniques.

Les limites du casual gaming de Gran Turismo 7

Paradoxalement, c’est lorsqu’on arrive à ce niveau que Gran Turismo 7 n’est plus hyper Real Driving Machin. Les pneus par exemple, s’usent de manière quasi binaire. La perte d’adhérence manque de progressivité. Ce n’est pas subtil, comme le carburant d’ailleurs. J’ai essayé en ne dépassant pas les 2 500 tr/min (j’aime me faire chier) et ça ne change presque rien à une conduite en tapant le rupteur à chaque passage de vitesse. Mais qui fait ça sur un circuit de toutes façons ?

Pas de quoi s’alarmer, je n’ai plus le temps ni l’âge de devenir pilote, si toutefois je n’en ai jamais eu le talent. Mais surtout, le réalisme supérieur existe, c’est R-Factor ou i-Racing et ce ne sont plus des jeux, mais des outils de sport automobile.

On s’accommode de ces limites. L’immersion est là.

Presque, car si les intérieurs sont archi bien modélisés avec un souci du détail rare, on n’a aucun moyen de les visiter à la manière d’un Forza Motorsport… 6. Ouais, Forza permet de monter dans l’habitacle et toute une série d’interactions dont la mise du contact, l’activation de certains boutons et la possibilité de faire rugir le moteur et ça, sans lâcher un gramme de CO2 supplémentaire. Une option Hidalgo Greta friendly qu’on n’a pas dans Gran Turismo 7.

Impossible donc jouir de l’intérieur de sa voiture (en dehors des courses) et de faire des trucs que Forza proposait déjà il y a 10 ans ! Oui je compare deux licences sur deux plateformes différentes et alors ?

Real Pricing Simulator : farme à mort si tu peux

Inachevé mais déjà sympa

Gran Turismo est sorti le jour J, mais il n’était pas fini. Vous avez bien lu. Nous avons claqué 99 euros pour un jeu non terminé. L’amour rend aveugle, il rend un peu con aussi. Mais tel un Jésus numérique, on pardonne. On se dit que ça viendra, car GT n’est qu’amour de la bagnole. C’est une grosse claque sur une joue gauche bien tendue qui est venue. La dernière mise à jour a corrigé de problèmes introduits par la mise à jour précédente (bien jouer Polyphony Digiclown). Mais s’il y a bien un élément qui n’a pas bégayé, c’est la gestion des crédits.

Oui, GT7 permet de tuner sa bagnole, de s’acheter des caisses, de les regarder moyennant la monnaie du jeu. Mais avec la MAJ 1.07, la gestion de ces transactions virtuelles a été repensée : moins de thunes délivrée, moins de gains en course et des voitures plus chères. L’idée étant de se rapprocher de la réalité. Heureusement qu’on ne se retrouve pas à payer les dégâts et la peinture.

À la manière du gouvernement, cette baisse du pouvoir d’achat et augmentation tarifaire soudaine et violente ont été compensées par un don d’un million de crédit (1/19ème du prix d’une McLaren F1) ce qui fait 10 € dans la vraie vie, soit 10 fois moins que ce qu’a accordé l’Etat français. Mais on peut s’affranchir de jouer avec une caisse de légende, moins de remplir le réservoir de sa caisse.

Farmer ou payer et c’est gagné !

Entendons nous bien : on ne veut pas tout avoir facilement. Mais la version initiale était parfaitement équilibrée. Ni trop, ni pas assez. La nouvelle gestion incite à farmer (ndlr : jouer énormément en recommençant encore et encore des épreuves dans le but d’améliorer les performances d’un personnage ou de gagner plus d’oseille virtuelle).

Jouer la carte de la nostalgie revient à charmer les joueurs de la première heure. Ceux qui ont connu le premier GT ont dans les 40 piges. ils n’ont pas le temps de farmer ni de niaiser. Proposer des caisses à 18 millions de crédits, avec des « paypass » à 20 € les 2 millions de crédits, ça fait 180 balles la voiture. 180 euros, c’est ce que coûte un volant.

Pour le temps, cela revient à jouer la même course 3 heures par jour pendant 12 jours (dixit mon frangin avec un smiley mécontent et des points d’exclamations dans un SMS). Pour sûr, vous le connaîtrez par cœur le circuit après. Et ça, c’est pour une seule voiture. Hagerty est donc l’allégorie d’Artcurial, en plus cher encore (oui c’est possible).

Vous pensez revendre vos bagnoles ? Impossible ! Alors que Polyphony aurait pu mettre en place un marché façon Fifa Ultimate Team, avec un contrôle des tarifs, il n’en est rien. Enfin, ça devrait arriver bientôt. D’ici quelques MAJ (quand la majorité aura lâché le jeu, dommage).

On se contente de la boutique de bagnoles d’occasion qui se renouvellent lentement. On apprécie d’ailleurs énormément les mentions « peu de stock » qui te mettent une pression d’achat (NON) !

Une pression d’achat qui te motive à passer par la case « dépense » parce que d’ici à ce que tu aies fini de faire 200 fois la même course, le modèle aura disparu.

Oui j’y joue, oui j’aime bien, alors que je voulais l’aimer tout court

Gran Turismo 7, Polyphony Digital et Kazunori Yamauchi me font de la peine. Pourquoi ? Suis-je con à ce point ? Peut-être. Mais comme je l’ai mentionné plus haut, je suis fan de Gran Turismo depuis le premier opus, qui m’a ouvert une autoroute vers l’amour de l’automobile. Kazunori Yamauchi, le papa de Gran Turismo et de l’ordinateur de bord de la vraie GTR est un fan d’automobile. La légende raconte qu’il mettait du SP98 sur ses pancakes avant que le litre n’atteigne 2,50 €.

Je pense, sans preuve donc c’est une modeste opinion, que ce changement a été imposé par Sony, afin que le jeu soit plus rentable, plus rapidement. Mais ne pouvant plus essuyer ces larmes de tristesses avec des billets de 5 € à cause de ma Prius GTRien, je vais me contenter de rester modeste. De jouer un peu. De cibler les caisses finalement peu nombreuses pour un jeu d’une telle envergure et laisser tout de même le temps au studio de sortir une version finalisée de son jeu.

Une version qui sortira en GOTY (Game Of The Year), complète, avec tous les DLC (suppléments payants) à 40 € dans un an et qui me rappellera qu’aujourd’hui, la mention triple A signifie AAArnaque.

Conclure avec Gran Turismo 7

Gran Turismo 7, malgré son modèle économique bancale et sa sortie précoce reste à mes yeux la parfaite fusion entre le plaisir de piloter et le kiffe de performer. J’y passe des heures ou des minutes, à taper le chrono seul ou contre des amis, des vrais. Je m’isole un peu dans cet univers virtuel à « piloter » des bagnoles que je ne conduirai jamais, sur des circuits où je n’irai jamais poser les roues.

Gran Turismo 7 avait tout pour briller, y compris un accueil chaleureux de la presse et des fans malgré la sortie d’un jeu inachevé. Mais une grosse mise à jour a littéralement plombé le délire et fait ressortir tous ces défauts que l’on avait choisi d’occulter. C’est con, mais ça en fait une simple proposition de jeu de bagnoles au lieu du mythe auquel il aurait pu prétendre.

Les jeunes passeront vite à autre chose, mais pour les vieux de 40 piges comme moi, c’est la solution facile à tous les rêves suscités par le premier opus dont je sais que je ne réaliserai désormais jamais.

On aime

+ Les caisses sont bien modélisées.
+ La bande son est cool mais pas autant qu'un Forza Horizon.
+ Le mode photo sur lequel on passe des heures est plutôt bien fichu.
+ La météo dynamique enfin présente.
+ La sensation de conduite à la manette comme au volant.
+ L'aspect collection virtuelle.
+ L'encyclopédie automobile des GT.
+ Le mode Tuning putaing.
+ Le retour du mode carrière.
+ Le rendu général et les effets de lumière.

On aime moins

- Cette mise à jour de merde qui incite à payer plutôt qu'à profiter.
- Le jeu vendu plein pot mais pas fini.
- L'interface sur les infos des voitures trop petite.
- Le côté très directif de l'avancée du jeu.
- Quelques caisses d'occasion histoire de dire que le mode y est.
- L'absence d'un marché de l'occasion entre joueurs.
- Les multiples déclinaisons des mêmes modèles pour grossir la base de donnée.
- La gestion des collisions toujours à la ramasse.
- Les habitacles impossibles à explorer et donc sans interaction (à la différence de Forza).

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Le Stagiaire
Nourrit à base d'huile de tournesol 15W40 et de chips Vico, le stagiaire n'a pas de nom, parce qu'il ne le mérite pas. Il nettoie les locaux virtuels de Hoonited et entre 2 coups de serpillère virtuelle, il écrit des trucs et taxe des voitures pour les essais.