Hier, Tesla a annoncé un Model Y et une Model 3 « oh peu chèreu ». Le constructeur en a profité pour renommer sa gamme. Forcément, c’est Tesla, tout le monde a réagi à chaud, parce qu’on aime bien taper sur la marque d’Elon Musk, avec ses fanboys relous, mais attachants. C’est dommage, parce que c’est un cas d’école de business. Donc c’est parti, leçon !
Hier, Tesla a renommé sa gamme. L’idée étant de segmenter un peu plus. Jusqu’alors, l’entrée de gamme était le modèle Propulsion, dénommé « Prop » par les initiés. La version grande autonomie propulsion, elle, était appelée « LR Prop ». Et la version toute blanche conduite par un chauve « Monsieur Prop ». Il y avait ensuite les Dual Motor et Perf.
Donc point de réel « entrée de gamme », car le ticket d’entrée offrait tout de la version la plus chère, si ce n’était que la batterie (plus petite) et un moteur de moins (à l’avant).

Désormais, cette version « Propulsion » se nomme « Premium », parce que ça claque plus de dire que vous avez une Tesla Model 3 Premium que de dire que vous avez une Tesla Model 3 Propulsion. Propulsion ça ne parle à personne, sauf à ce connard d’Anatole-Karim qui ne jure que par la douceur de son 5 cylindres allemand tout en rêvant d’un 6 cylindres en porte à faux arrière refroidi par « R » et qui s’en bat royalement les glaouis de votre « grille-pain pour écolo-bobos ».
Et ne vous fourvoyez pas. L’image sociale compte. Et pas qu’un peu. Mais ce n’est pas le sujet.
La cible, la cible, la cible. Faut Targetter Mathias !
Un produit ou un service, c’est apporter la réponse au besoin d’un client en devenir (un prospect). Comment ? En apportant une solution à ce besoin, certes, mais surtout, en suscitant le DÉSIR. Dans « UN CAFÉ NOMMÉ DÉSIR », on ne vous vend pas une haleine de poney, des dents jaunes et l’envie d’uriner et faire popo. On vous vend une enveloppe charnelle, une sensation, une émotion, quelque chose qui illumine vos sens et qui vous émerveille (ouais du sexe fantasmé). Vous vous projetez la gorgée de café comme une expérience sensorielle. Vous n’aurez jamais un cadre qui part bosser pour la pub d’un parfum. Les pâtes ne sont pas juste des pâtes : c’est un chef italien qui parle les doigts pointant en l’air sur un air de Laura Pausini en duo avec Eros Ramazzotti. Moi-même, j’avais des musiques italiennes plein la tête en roulant en Alfa Romeo.
Alors qui vise Tesla ? Et quel levier désirable est à actionner ? Les fans de Tesla ? NON diantre ! Ils sont déjà acquis à la cause.
Tesla cherche un nouveau souffle, un nouveau vivier à prospects. Tesla veut toucher les gens qui lorgnaient de loin sur la marque, qui étaient intrigués et vaguement intéressés, mais pour qui, Tesla était trop cher. Car dans la tête des gens, Tesla fait du premium. Et oui, pour ces gens, les Model 3 et Y sont des déclinaisons du Model S.
Or, en actant un modèle Y à 39 990$ (soit moins de 40k$) et en faisant du prix le pilier de communication du Model (qui n’a pour lui que cela), Tesla crée une association : TESLA = accessible financièrement.


Une Tesla au rabais, pourquoi ?
Il y a un peu la marge de la caisse. Mais ce n’est pas le but recherché. Il faut que ces Tesla Model 3 et Y au rabais affichent ouvertement être des modèles moins chers. Pas au rabais sur la conception. Pas au rabais sur les éléments essentiels (espace à bord, sécurité, prouts). Au rabais sur les fonctions dispensables. Le seul élément marquant qui disparaît est « l’autopilote ». Un choix là encore bien vu, dans la mesure où il acte le pas entre la gamme appelée désormais Premium (et qui doit le justifier) et le modèle au rabais.
Le client visé en haut se dit alors « OK on perd des trucs, mais ce n’est pas grave, on ne peut pas tout avoir ».
Dès lors, le poisson, tel Léo, est ferré (pas simple celle-ci). Tesla qui paraissait inaccessible devient possible.
Soit il achète le modèle au rabais et il sera content et Tesla a vendu. Soit, et ce sera majoritairement le cas, il attend une offre (modèle en stock, promo) pour passer sur la vraie Tesla full gadgets, dont l’autopilote, pilier de communication de Tesla (pilier nul d’ailleurs, mais j’en ai déjà parlé ici).


Conclusion : Tesla chope de nouveaux prospects, les actionnaires sont contents
Tesla élargit de fait sa clientèle. Tout cela en réduisant les coûts d’un véhicule déjà existant et déjà amorti. Plus fort, le nouveau Model Y emprunte au Juniper l’intégralité des évolutions techniques : trains roulants, contrôleur d’accélération/freinage, volant, direction recalibrée, etc. Il devient ainsi une alternative neuve (avec laquelle TESLA gagne de la thune) aux Model Y d’occasion de première génération (sur lesquels Tesla ne touche rien). Bref, rien de ce qui caractérise Tesla dans la tête des nouveaux clients potentiels n’a été oublié, c’est judicieux. Judicieux car ça rend cette proposition réellement crédible. Elle n’est pas faite pour représenter le haut des ventes, mais elle peut être achetée sans que le client ne le regrette.








